Lettre aux copaines

Le dernier dimanche du mois je raconte où j'en suis dans l'écriture du roman en cours, les voyages de recherche et les transitions de vie. Comme si vous étiez des copaines. Base actuelle : Athènes.

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Par mélie boltz nasr
4 août · 7 mn à lire
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Lettre XIII - Masc, pas masc

Je vous écris de Berlin. J'ai du retard à la publication - des mini coquilles de santé, un weekend de pride et sans doute du mal à percevoir l'écoulement du temps. Mais me revoilà. Pour une grande question : les personnages masculins, pourquoi me sont ils difficiles à écrire en ce moment ?

Guten Tag les copaines,

Berlin oblige, léger changement de langue. Mais je vous rassure - ou pas - la prochaine newsletter sera écrite depuis la Grèce, et même depuis Lesvos à nouveau.

[Les génocides continuent en toile de fond d’être une partie importante de mon expérience du monde actuellement : je vous invite si vous le pouvez à vous investir financièrement (par exemple l’une des cagnottes individuelles comme celle de la famille de Husam (que j’ai rencontré à Athènes) ou l’une des organisations transversales comme (MAP, le Programme alimentaire mondiale)) ou en parrainant une cagnotte avec 1semaine1cagnotte, dont je vous parlerais sans doute plus dans la prochaine newsletter.]

Beaucoup de choses se sont écoulées en cinq semaines. Je digère encore, et cette newsletter sera surtout sur un sujet d’écriture qui me turlupine, qui touche à des questions que je me pose et que l’on me pose. J’en profiterai pour faire quelques petites ôdes à des queerbies qui ont fait vibrer mon coeur ces derniers temps.

Bref. On va parler de mes difficultés d’écriture concernant spécifiquement les personnages masculins.

[Et si ce sont les ateliers d’écriture qui t’intéressent, scroll jusqu’en bas !]

Yallah, c’est parti !

Constat

Commençons par le constat. Tout simple. Les chapitres sur lesquels je bloque, ceux qui me rendent dingue, qui me donnent envie de tout arrêter et me font craindre que ce roman ne sera jamais assez bien pour être lu, ce sont ceux où la narration est faite avec la voix d’un personnage masculin.

J’en ai deux. Un adolescent, un père. C’est surtout l’adolescent qui apparait au début et j’ai donc cru, depuis des mois que ce qui me rendait cette écriture si difficile, c’était ses spécificités à lui. Quand j’ai envoyé les premiers chapitres en bêta-lecture, c’est-à-dire auprès de volontaires qui étaient prêt·es à lire en avant première mon début de roman, c’est l’un des personnages qui a le plus plu. Je me suis donc dit qu’il était difficile à écrire, mais bien écrit ? Soit. Pourquoi pas. Et tant mieux. Ça fait toujours chaud au cœur quand des lecteurices aiment bien un personnage qu’on a écrit.

Depuis quelques semaines je suis en train de relire les chapitres écrits du point de vue du père. Et à nouveau, j’ai une baisse de confiance. Je trouve ses chapitres poussifs, j’aime pas trop ce personnage et je n’arrive pas à lui insuffler quelque chose qui m’amuse, qui me le rend aimable. Je peine. Ce n’est pas super grave, mais c’est quand même étonnant que ce soit les personnages masculins qui buttent à chaque fois. Alors que des personnages féminins très éloignés de moi s’écrivent plutôt dans la bonne humeur, ou en tout cas avec énergie.

Les questions

Que mon adolescent me pose des difficultés à écrire ne m’a pas tant étonné. D’abord, je vis mon adolescence queer/lesbienne/bi/pan, parfois l’inconfort du personnage fait écho au mien. J’ai déjà beaucoup partagé à ce sujet (par exemple ici) donc je ne vais pas rentrer à nouveau dedans. Ensuite, je me suis toujours demandé quel genre de garçon et homme j’aurai été.

Ça me semble une question assez banale. Vous avez sans doute déjà réfléchi à la question. À quoi vous auriez ressemblé, est-ce que vous auriez eu les mêmes envies amicales et romantiques, est-ce que vous auriez eu les même passe temps si à la naissance on vous avait attribué “l’autre” genre ? Par exemple, je m’imagine un corps pas très grand mais un peu plus lourd, une moustache occasionnelle, et probablement que je n’aurai pas fait de théâtre. Si j’avais été élevé garçon.

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